Regards

Je pense à toi visiteur ! Quel pas t’a donc guidé à ma porte ? Serait-ce le pas tranquille du chineur indulgent ? Viens donc mon frère ! Je te propose mes rêves et mes espoirs. Et si tu veux bien, juste là, mes joies et mes peines. Et encore là, regarde, mes rires et mes pleurs. Et au fond, à l’abri des méchantes gens, mes peurs et mes faiblesses. Juste goûte et apprécie. Et trinquons, frère, là, à l’ombre de la passion.

Nom :
Lieu : Rabat, Morocco

18 janvier 2008

Pourpre

Photo KBB
Je suis là ! Oui, juste là !
Ne me vois-tu pas ?
Que ne contemples-tu l’azur de ta prunelle ?
Tu m’y verrais, resplendissant d’amour !
Eclipsant, frères, cousins, voisins
Combien beau je suis, quand je t’admire !
Là, juste là, chevauchant l’écume de ton regard
Je te crie ma passion !
Que ne contemples-tu le pourpre de ma prunelle ?
Tu t’y verrais, éclatante de lumière !
Là, juste là !
Où jamais ne meurent tes vagues !

17 janvier 2008

Poussière


Photo KBB

Poussière j’étais, poussière je redeviendrai
L’appel de la terre m’enivre mes enfants
Laissez donc votre vieux père s’abîmer dans ses entrailles
Je vous lègue le soleil
Abreuvez-vous à ses rayons, mais jamais ne lui prêtez le flanc
Je vous lègue le vent
Dansez à ses bras, mais jamais ne pliez l’échine
Je vous lègue la lumière
Faites en votre alliée, mais jamais ne vous croyez plus brillants
Je vous lègue la rosée
Parez vous en votre soûl, mais jamais ne croyez ses perles éternelles
Je vous lègue la fourmi, je vous lègue l’abeille
Prenez-en grand soin, prenez-en de la graine
Humbles soyez, grands vous serez
Poussière vous fûtes, poussière vous redeviendrez

28 mai 2007

Je n’existe pas …

« Mais pourquoi voulez-vous faire du théâtre ? », lance la réalisatrice au candidat au casting, auteur d’une tentative d’interprétation particulièrement mauvaise. Un moment d’hésitation, quelques déglutitions et le pauvre homme se lance : « Je n’existe pas ! ».

Ma main tâtonne à la recherche de la télécommande et met en pause la projection du très agréable « Bigger than the Sky » du réalisateur Al Corley. C’est sans doute le moment le plus fort du film. Cette sourde conscience de non-existence qui finit par exploser, presque, en cri de détresse. Ce ridicule que l’on ose braver pour être simplement visible aux autres. Cette tragédie que vivent des millions d’électrons solitaires, en permanente recherche d’une configuration permettant la greffe. Cette douleur du rejet, tant de fois soufferte, et pourtant, à nouveau tentée. Ce jet d’espoir, se faufilant dans les interstices d’une chape de convenances et de convenus, pour jaillir, geyser, revendiquant, une énormité, le premier rôle dans la pièce de Cyrano de Bergerac.

La question s’impose, aveuglante, dans la pièce qu’éclaire à peine l’image figée sur l’écran. « Est ce que j’existe ? ». Quels Cyranos ai-je revendiqués ? Quels ridicules ai-je bravés ? Quelles chapes ai-je fracassées ? Quelles mains ai-je tendues ? Quelles bouées ai-je saisies ? Quelles révoltes ai-je menées contre ce statut d’électron solitaire ?

La réponse ? Je la cherche encore entre ces lignes, baignées de votre regard interpellé.

Non ! Elle est là. Sous vos yeux. Dans chaque mot. Dans chaque phrase. Dans chaque idée que fait naître, mon cri à moi, dans votre esprit. Peut être avez-vous déjà, à votre tour, lâché la souris pour mieux écouter ce cri. Peut être a-t-il soulevé, bien profond, bien loin, au-delà de votre chape, un écho, prémisse d’un geyser d’espoir.

Ma main a tâtonné pour retrouver la télécommande. La vôtre s’est saisie de la souris. La vie a continué. Mais, pendant un instant, mon Cyrano et moi, avons existé.

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04 janvier 2007

Eclat d’amour

Fugitive, l’image-éclair illumine mon esprit, à l’instant où je m’apprête à entamer cette deuxième lettre. Je revois le sourire de cette inconnue, fendant la foule compacte pour m’atteindre en plein cœur. Etincelle, jaillie du choc furtif de nos regards, puis explosion de lucidité révélant mille possibilités. Je ne bronche pas. La lueur s’estampe. Le sourire est déjà un souvenir. Ce soir, il remonte à si loin que je renonce à en traquer la trace. Pourquoi faire ? Dans mon esprit, subsiste, intact, cet éclat d’amour brut.

Je souris… au souvenir de ce sourire. Peut être que de mon sourire jaillira une pensée, qui s’élèvera là-haut dans la ronde des pensées furtives, porter son grain d’amour brut. Peut être qu’à chaque fois qu’un soupir nostalgique s’élance d’un cœur, un grain d’amour tapisse le firmament. Combien de sourires faudrait-il ? Combien de soupirs ? Pour que nos âmes soient coiffées d’amour ?

En attendant, la comète a emporté dans son sillage les mots que je vous destinais. Qu’importe ! Peut être avons-nous, un moment, sur cet éclat d’amour, chevauché l’éternité.

30 décembre 2006

Mes mots, ces traîtres !

Je découvre mes mots à chaque fois que je vous écris. Je m’étonne, et m’agace, je l’avoue, de constater que je ne prends la mesure de mes matinées, mes soirées, mes longues nuits qu’au moment où je vous les rapporte.

C’est comme si mes mots refusaient, hors ce partage, d’exprimer mes sensations, mes sentiments, mes élans.

Parfois je m’insurge ! Je m’applique à transcrire pour moi-même les minutes, les heures, les jours mêmes. Des pages et des pages, noircies avec rage, toujours blanches pour mon esprit et mon cœur.

Je finis par renouer mes attaches, rompues le temps d’un sursaut d’orgueil.

Et ma plume, en parcourant pour vous les feuillets, essaime la vie. Ma soif de mot, je le sais, ne saurait s’étancher qu’à la source de votre regard.

J’en conçois de la gêne, tant je crains vous importuner quand les élans de ma plume se feront caprices.

Mais aussi du plaisir. De voir mes mots, ces traîtres, se sachant votre offrande, se parer enfin d’esprit !

19 novembre 2006

L’allée du Généralissime

Aussi loin que je me souvienne, la terre de mon enfance embaume la fleur d’oranger. Des dizaines, des centaines d’orangers, que mon imagination assoiffée d’aventure, me dessinait comme une armée de milliers de fantassins, alignés, fiers et disciplinés. Au milieu de mon régiment courrait une allée façonnée par des années de vas et viens de véhicules de tous genres. L’allée du généralissime, inspectant à chaque aube ses troupes taillées au plus près, chaussées à perte de vue de chaux blanche, impeccables au garde à vous, accordant à peine au souffle du vent de ma campagne, quelques bruissements de leur dense feuillage.

Baignée du soleil de mon Gharb d’adoption, mon allée déroulait sur trois centaines de mètres ses deux sillons parallèles pour déboucher sur une vaste place encadrée de grenadiers. Tout autour, se dressaient notre maison, une basse bâtisse en pierre, aux chambres non communicantes que coiffait une généreuse vigne, un immense hangar abritant cote à cote la Chrysler de mon père, le vieux tracteur Massey Fergusson, des charrues, des bêcheuses et enfin le plus beau … une gigantesque étable aux magnifiques tuiles rouges, rarissimes sous ces latitudes, qui préservait de mes convoitises, les amours de dizaines de couples de pigeons sauvages.

Quelque peu en retrait, comme pour s’excuser de faire tache dans ce décor de ranch texan, s’encastrait au bout d’un couloir le poulailler où régnait en maître absolu le coq de la ferme, monument de morgue et d’insolence, dont la ruse et les redoutables coups de bec, avaient toujours réduit en échec mes expéditions de justicier.

Au-delà de l’étable, s’étendait, aussi loin que portait le regard de mes sept printemps, un verger où cohabitaient sereins, cognassiers, citronniers, abricotiers. Sur ce front avancé, la discipline se relâchait. L’imposante allée du Généralissime n’était guère plus qu’un sentier offert aux herbes folles. Mes troupes se laissaient aller à une joyeuse cacophonie, martelée à longueur de journées par plus d’oiseaux que ne pouvaient embrasser mes regards émerveillés.

Mes percées en éclaireur, carquois en bandoulière, au-delà de ces remparts, m’amenaient, aux confins de mon domaine, dans une contrée étrange où se dressaient les vestiges d’un bois d’eucalyptus entourant ce qui avait dû être un lac poissonneux. Sur ces terres hostiles, je troquais prudemment ma tunique de Généralissime contre la coiffe du chef Sioux, Hibou rusé. J’avançais à pas de loup vers le lit du lac, scrutait hâtivement les herbes à la recherche de mon trophée. Et, une fois mon coquillage en main, détallait à bout de courage, vers la rassurante cacophonie de mes troupes indisciplinées, en prenant bien soin d’éviter la vieille cabane du gardien que l’on disait hantée par un fantôme au corps de serpent.

Quand, le souffle court je m’arrêtais enfin, je brandissais fièrement mon coquillage centenaire, le portait à mon oreille pour écouter, mille images en tête, la plainte de l’océan chassé de ses terres.

Au loin, à l’autre bout de l’allée, se dressait l’imposant portail en fer forgé au bleu pâli par le soleil et les années. Haut, majestueux, les épais battants ceints d’une lourde chaîne que bouclait un immense cadenas, il protégeait l’entrée de mon coin de paradis. C’est quand il s’ouvrait devant la voiture de mon père en grinçant des gonds, que commençaient véritablement mes vacances d’été.

Trente années après, quand il fait gris sur mon cœur, je ferme les yeux et j’entends au loin cette longue plainte, annonçant le bonheur intact des belles années de mon enfance.

09 novembre 2006

Une histoire de …papillon

Il naquit par une douce aube de printemps

L’oiseau, sur l’arbre perché, d’un long chant, salua sa naissance. La terre humide embauma l’air, frémissant sous les premières lueurs du jour. Le tapis vert, de jeunes pousses tressé, scintilla de mille gouttes de rosée.

Il s’ébroua, tendit ses membres.
Les premiers rayons de soleil le pénétrèrent, le séchèrent, le chauffèrent.
Sous leur souffle, se révéla la splendeur !

Son regard, émergeant de l’océan de torpeur, se porta sur son corps de chenille, et se figea. Majestueuses, se déroulaient deux ailes drapées de mille nuances. Il en bougea une, puis l’autre, et la lumière du jour éclata en infinies gerbes d’arcs-en ciel.

Il en fit battre une, puis l’autre, et, merveille ! La fraîche brise matinale, le berça, le caressa, le souleva ! Il était la fleur, qui, dédaignant le sol, montait là-haut valser aux bras du vent. Il était grand, beau, libre ! Il était Papillon.

Sa joie explosa ! Il vola, dansa, papillonna.
Les fleurs se disputèrent ses faveurs, se parant de leurs meilleures senteurs. Mais, nulle n’était assez belle. Insatiable, volage, il battait vite des ailes, quêtant un nouvel hommage.

Plus le soleil chauffait, plus ses couleurs resplendissaient, plus il sombrait joyeusement dans son tourbillon de passion. De béguin en amourette, de caprice en passade, l’aventure le mena loin de ce cocon qui avait façonné la merveille. Loin de cet arbre qui l’avait accueilli, nourri, protégé…

L’herbe douce fit place à un désert de rocaille. La hargne du soleil, y embrasait un océan de larmes cristallines. Ses forces, d’un coup, le quittèrent. Il se posa, contraint.

Le regard blasé de beauté, distingua à peine la laide créature.
Le nez en l’air, l’allure figée, arrogante, elle faisait bloc avec la roche. Les yeux, au regard d’acier, brillaient de mille feux.


Captivé, fasciné, ébloui, le papillon, hypnotisé, dévora son reflet dans les prunelles de feu. La chose l’ignora avec superbe. Piqué, il s’approcha encore et encore. En vain. Enhardi il battit d’une aile, puis de l'autre, éxhiba ses arcs-en-ciel, et, enfin, la chose daigna le remarquer.

La tête triangulaire tourna lentement, majestueusement ;
Le Papillon frémit d’orgueil et posa, offrant ses charmes au regard conquis ;
La chose ouvrit la bouche, comme émerveillée ;
La langue, longue et gluante, tel l’éclair, se détendit;


Le lézard happa le papillon.