Regards

Je pense à toi visiteur ! Quel pas t’a donc guidé à ma porte ? Serait-ce le pas tranquille du chineur indulgent ? Viens donc mon frère ! Je te propose mes rêves et mes espoirs. Et si tu veux bien, juste là, mes joies et mes peines. Et encore là, regarde, mes rires et mes pleurs. Et au fond, à l’abri des méchantes gens, mes peurs et mes faiblesses. Juste goûte et apprécie. Et trinquons, frère, là, à l’ombre de la passion.

Nom :
Lieu : Rabat, Morocco

06 novembre 2006

Ce soir … je SUIS

C’est la musique qui m’a réveillé. Si tant est que j’étais réveillé. Si tant est qu’il s’agissait d’une musique. Les vibrations sourdes, puissantes, tenaces s’immisçaient peu à peu dans mon esprit. Leur écho se répandait dans mon corps endolori de fatigue. De l’impact de ses ondes jaillissaient des éclats de conscience. Je prenais lentement pied dans la réalité. Mes yeux écartèrent laborieusement les derniers voiles de Morphée, pendant que me prenait aux viscères la clameur virile, sauvage, primitive.

Le rêve se dissipa. Soulevé par les vibrations, je fis quelques pas incertains vers la révélation. Dans la vaste cour intérieure de la maison de mon grand père, une quinzaine de grands gaillards alignés en jellaba, selham et rezza donnaient la réplique à autant de femmes. Fiers, droits, beaux, les uns et les autres dressaient deux lignes compactes de part et d’autre de deux bnadria, faisant à chaque note vibrer les fondations de la vieille bâtisse. Les deux masses, traversées de la même houle, se cherchaient, se fuyaient, s’intimidaient, s’amadouaient…

A quelques heures de l’aube, dans une propriété perchée sur les hauteurs de l’Atlas, tout près des étoiles, dans une nuit glaciale qu’entamaient à peine de grands feux crépitant de milliers d’étincelles, le mariage de mon cousin battait son plein. Je découvrais mon premier Ahidous.

Ce soir, trente ans après, casque sur la tête, résonne à plein volume dans mes oreilles, la même clameur. Mon sang berbère reconnaît son tempo et s’emballe. Mes doigts, en transe, courent sur le clavier, vous esquissant les contours de ma résurrection.

Je ferme les yeux. S’élèvent devant mon esprit, au loin, les sommets enneigés de l’Atlas de mon enfance. Ils sont là mes guerriers farouches. Elles sont là mes guerrières. Leur unisson résonne encore dans la pierre meurtrie par le souffle du soleil et la poigne du blizzard. Ils sont là les miens. Tous les miens. Au fond de moi.

Demain sera un autre jour. Ce soir je fais quelques pas décidés et me fonds dans la rangée des hommes. De mes entrailles jaillit, intacte, la même clameur. Mon âme bat la mesure.

2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

L'appel des racines prend forme, réveille les souvenirs, provoque la nostalgie...
Dès les premières lignes, on devine l'ambiance berbère particulière par ses mélodies, ses chants, ses mouvements corporels imprégnés de pudeur, mêlés de convoitise...On sent l'ambiance conviviale faite de simplicité et de beauté...
Qu'ils soient issus de la plaine ou de la montagne, les berbères transportent une culture à part qui dégage la dignité et la fierté!
Et tu ES déjà dans ce demain, JOUR NOUVEAU qui t'accueille...

07 novembre, 2006 00:48  
Blogger lynn said...

On se sent porté par le rythme des chants, on se sent porté par ces notes à la fois mélodieuses et nostalgiques. Une narration avec des embruns imbibés d'une culture de partage.
Là bas dans la montagne, en dépit du froid, l'ambiance est à la fête.
Des phrases s’alignent, une atmosphère s'installe qui "bat la mesure" à la description.
Merci pour le partage

07 novembre, 2006 06:16  

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